La Bataille de France, au jour le jour !

Ces témoignages sont extraits d'écrits d'époques trouvés lors de nos recherches.

5e Cie : Sous-lieutenant Vincenot - EM 3e Bat. : Lieutenant Ollivier - Services sanitaires : Médecin-capitaine Roquet - 10e Cie : aspirant Péricard

- 10 MAI -

"10 mai 4h40 : réveil, fortes détonations qui me font penser aux tirs de DCA assez nombreux depuis quelques jours du fait des reconnaissances adverses à hautes altitudes. Détonations se succédant jusqu’à 5h30. Distance 1800m. Bombes de faibles calibre. Résultats médiocres quant à l’efficacité (moraux importants).
DCA sur cantonnement assurée par une SM [Section de Mitrailleuse] est désormais assurée de jour et de nuit par une demie-CA [DCA armée de mitrailleuse de 20mm] et toutes les armes automatiques des compagnies de voltigeurs.
Habitants abandonnant la ville et même leur village, première image du réfugié, la route est déjà encombrée."

 - 11 MAI -

 

"11 mai 1940 bombardements même heure, même objectif = même résultat. Tentative de bombardement à 13h30, dispersée par la chasse : une mitrailleuse du bataillon atteint un bombardier adverse, équipage saute en parachute. Je réussis à capturer le sergent pilote, le chef d’escadrille qui était à bord est capturé ; un mitrailleur, légèrement blessé, est soigné au PC Hanus. Nuit calme, passée sous la tente avec mes hommes.
Retour du commandant de compagnie à l’unité."

- 12 MAI - 

 

"c’est par un temps superbe, le jour de la pentecôte, qu’un motocycliste de liaison vint vers 14h00 nous apporter l’ordre de se tenir prêts à partir. L’ordre d’exécution tardait cependant et après une journée assez angoissante, pendant laquelle nous commentions les nouvelles tout en conjecturant sur notre destination, Belgique ou Hollande, tout le monde se coucha.
Bientôt le vacarme d’une moto retentit dans la nuit. Il était environ 22 heures. C’était l’ordre de départ ! Rapidement habillés, tous furent en tenue en quelques minutes ; conservant de ce court sommeil la bouche un peu sèche, avec, cette fois en plus, un peu de crispation à la gorge qui rendait les voix plus rauques. Ce fut cependant le tableau familier du départ : appels, ronflements de moteurs, alignement des voitures, phares éteints, dans l’ombre claire d’une nuit de mai."

- 13 MAI -

 

"Départ de la colonne vers 6h30. Marche assez rapide jusqu’à Vitry le François. Arrêt de la colonne jusqu’à 10h30, en pleine ville. Protection de D.C.A. illusoire, 4 mitrailleuses Saint-Étienne du train auto, pour un convoi s’étalant sur plus d’1km500. Passage à Châlons sur Marne. Vitesse de route oscillant autour de 40 km/h. Valmy, Sainte-Menehould, Rethel, Vouziers : 14 h. Jusqu’à ce moment, aucun incident sérieux ne s’est produit à part quelques encombrements sur la route dus soit au manque de discipline routière soit au manque de signalisation. Moral de la troupe nettement bon, mais débraillé et relâchement de la tenue : conséquences nettes de notre séjour peu « militaire » à Saint-Dizier.
Arrêt de toute la D.I. à Vouziers même et aux abords immédiats : souci du camouflage réduit à zéro. Attente 2 h, cause inconnue. Vu les premiers réfugiés se dirigeant vers la Marne ; hélas, combien d’autres en verrais-je ? Mise en route vers 16 h sur la route de Stenay (20 km). Arrêt au bout de 9 km, au-dessus du hameau forestier de Longwé (dépôt de munitions dans la forêt). Idée heureuse de camoufler ma section dès son débarquement : 10 minutes après notre arrivée, la présence de la colonne ayant été observée à Vouziers, bombardements massifs sur cette ville jusqu’à 18 h. Attente dans les bois jusqu’à 18h30. Avions par groupe de 9. Présence de 45 avions adverses, pour un chasseur allié. Cantonnement rudimentaire dans Longwé (centre occupé en permanence par des sections de ravitaillement en munitions). Manque d’autorité du chef de bataillon qui n’exige rien ! Attente dans l’auberge, des ordres. Départ dans la nuit vers le front proche."

- 14 MAI -

 

Un peu avant midi le 14 mai, le régiment reçoit l’ordre de se porter à la lisière nord du bois du Mont-Dieu.
Il fait un soleil éclatant et les avions ennemis survolent continuellement au-dessus de nos têtes. Impossible de camoufler le mouvement et quelques unités vont bientôt en souffrir. Passant par Tannay nous croisons de nombreux fuyards appartenant à une division qui a subi un choc très violent dans les environs de Chémery.
Quelques-uns par leurs récités effrayants essaient de semer la panique dans nos rangs. Malgré leurs yeux hagards et leur air bouleversé, ils n’ont cependant pas prises sur les « Sangliers » déjà aguerris par leur séjour d’hiver dans le secteur de Forbach. Toutefois, la résolution de nos hommes reste grave. Le danger et tout proche et les chapelets de bombes qui s’égrènent à courts intervalles la rappellent violemment.
Lentement, mais aussi vite qu’on le peut, nous nous acheminons vers la lisière qui nous avait été fixée. En passant par la ferme des Tuileries, nous saluons le colonel Jacques qui a installé là son PC. La 3e bataillon […] va prendre position sur la lisière qui s’étend de la côte 170 jusqu’au sud du hameau Le Vivier. Tout est à faire, c’est-à-dire qu’il faut creuser les emplacements de tir, préparer les abris, établir les liaisons, assurer le ravitaillement …
Les difficultés sont nombreuses : le relief du terrain rend l’observation délicate et très limitée, la densité du bois réduit considérablement la portée des E.R. 40, les mortiers ont bien du mal à trouver la clairière indispensable à leur tir

- 15 MAI -

 

"Dans la matinée du 15 mai, nous recevons l’ordre d’attaquer dans la direction de Chémery. L’opération doit être appuyée par des chars de la 3e division cuirassée qui comprend des chars légers et des chars de 30 tonnes […]. L’heure H est fixée à 14h30. Aussitôt l’ordre est communiqué à toutes les unités et chacun se prépare fiévreusement. Les chenillettes transportent les munitions et les E.R. 40 s’apprêtent à maintenir la liaison avec les unités engagées.
Mais du côté de Stonne, la situation est confuse et l’ennemi quia dû remarqué quelques déplacements à notre lisière tente quelques légers coups de main Une demi-heure avant l’heur H, un contrordre vient arrêter l’attaque. Les troupes rassemblées sur leur base de départ regagnent alors leur position de défense. Une section du 3e bataillon doit même déloger de ses trous trois Allemands qui s’y étaient installés."

- 16 MAI -

 

"La journée commence par la messe dite par l’aumônier et l’abbé Robbe. Dans la matinée, nous recevons du GSD le matériel demandé la veille en remplacement de ce qui a été détruits.
Le 2e bataillon redescend du Mont-Dieu. Le colonel du GRD nous prévient d’une alerte au gaz. Les masques sont placés en position d’attente. Il arrive successivement une quinzaine de blessés dont un sous-lieutenant de la 3e compagnie. Cependant, vers 10 heures, le PC du GRD, nos voisins, se replie, nous laissant seuls dans la ferme. Avant de partir, ils nous préviennent que l’ordre de partir va nous parvenir également.
En effet, un peu avant 11 heures, je reçois un papier, c’est l’ordre de nous replier immédiatement. Nous devons aller à une ferme à l’est de Tannay. Il n’est pas facile d’exécuter cet ordre de repli, car sans la camionnette Renault, nous manquons de moyens de transport. Je fais charger sur les sanitaires tous les blessés ainsi que le matériel que nous ne pouvons transporter afin que le GSD (Groupe Sanitaire Divisionnaire) nous le renvoie par la suite, quand nous serons installés à nouveau."

- 17 MAI -

 

"L’après-midi, l’ennemi attaque durement notre front. Les obus hachent littéralement les grands arbres, les branches en tombant encombrent rapidement les sentiers et coupent les fils téléphoniques, interrompant ainsi toute communication. Il faut faire appel aux « coureurs » pour assurer les liaisons avec le PC. Ceux-ci avec un courage et une ardeur qui n’étonnent plus au 91e ne cessent de parcourir les 1500 mètres qui nous séparent de la ligne de feu et qui paraissent bien longs sous la grêle d’obus.
Les blessés arrivent nombreux au poste de secours où, après un pansement rapide on les dirige vers le château du Mont-Dieu. En sens inverse, les munitions sont transportées avec les chenillettes sur la ligne de feu. Les FM tirent rageusement, aidés par les mitrailleuses et les tirs de morties. L’ennemi se heure vainement aux « Sangliers » mais il nous faut regretter au soir la mort de l’adjudant-chef colin et du sergent Allard.

- 18 MAI -

 

"Essai d’établissement sur les contre-pentes à la hauteur du 51ème. Reflux obligatoire après reconnaissance par section démontrant l’impossibilité de s’y maintenir de manière efficace.

Compte-rendu au Commandant.

Grande activité de l’artillerie divisionnaire. Travaux de campagne à l’épreuve dans le secteur du 51ème. Nous n’avons pas subi jusqu’alors des pertes comparables d’où aucune imitation, hélas, sur ce point pourtant sérieux. Reconnaissance active de l’ennemi par aviation.

Nouvelle officielle de la reprise de Sedan.Arrivée du ravitaillement, lettres… Soirée calme."

- 19 MAI -

 

"Nos positions du Mont-Dieu sont soumises de la part de l’artillerie ennemie à un bombardement sévère et prolongé. Les blessés les plus divers continuent à affluer. On les voit descendre le chemin par petits groupes. Bientôt deux pièces sont remplies de blessés couchés. Les autres après avoir été pansés et munis de leurs fiches dont dirigés vers les granges où Beauchard s’en occupe. Les éclats des obus lourds font des blessures hideuses, des délabrements considérables : bras ou jambes broyés, parfois presque arrachés. Je travaille dans le sang qui poisse les mains, les vêtements, les instruments. Rapidement, je coupe aux ciseaux les capotes ou les pantalons, essayant de ne poser de garrots qu’à bon escient.
Avec la pluie, le jour tombe vite et le travail continue à la lueur d’une bougie. Certains blessés se plaignent, d’autres agonisent. Nos provisions d’alcool et d’aliments sont vite épuisées. Pour nous, il n’est d’ailleurs pas question de manger ; il faut faire le plus vite possible. Je vois plusieurs crânes ouverts, laissant s’écouler des débris de cerveau. Les casques éventrés s’amoncellent dans les coins. Un blessé, la jambe broyée se plaint sans arrêt, réclamant une piqûre, cela ne peut le soulager. Je cède et lui fais faire une morphine qui ne le calmera pas. L’embouteillage est maintenant presque complet bien que je ne conserve dans les chambres que les plus graves. L’aumônier va de l’un à l’autre distribuant ses médailles pieuses, ses absolutions et ses encouragements. Au passage nous échangeons nos impressions : que de souffrances et d’horreur. Vraiment la guerre devrait être maudite."

- 20 MAI -

 

"Ordre de réoccuper le plateau dominant la gauche de la route. Avance réduite des 3ème et 4ème sections. Coups de main, à l’aube, des 1ère et 2ème. Aucune sûreté. Chance extraordinaire mais arrivons à 200 m des lignes adverses.
Organisation du terrain, malgré mon avis, reste superficielle et sans valeur sous un tir d’artillerie. Nous ferons l’expérience sous peu. J’ai assisté là à des actes d’héroïsme ou de stupidité… ? Je ne saurai jamais.
Observation incessante de l’aviation allemande. La troupe est tellement fourbue qu’elle oublie ce danger. Patrouille sur le plateau. En avant de Stonne, échange de coups de fusils, nombreux morts sur la crête nous dominant. Approvisionnement difficile, stock de munitions faible ; renouvellement qui sera par la faute des chefs de section en dessous des besoins.
Nuit dure. Attaques légères jusqu’à 2 h du matin. Je me persuade « qu’on dort très bien debout ». Proclamation Huntziger. Mauvaises nouvelles du nord."

- 21MAI -


"Comme chaque matin, l’adjudant Denise prépare pour le colonel le rapport journalier qui comporte surtout la liste des blessés. Il se sert pour ce travail de magnifiques papiers à beurre trouvés à la ferme « Mon Idée » ; il faut dire que toute notre réserve de papier a été détruite à Tannay.
Ce matin-là, Denise fait sa toilette et se rase soigneusement. Berthot passe et pousse un sifflement admiratif qui fait aussitôt bondir Mouchin qui pense à des arrivées de bombe et qui provoque une certaine émotion vite dissipée.
Les infirmiers sous la direction d’Edier étayent le cellier plus sérieusement avec de véritables troncs d’arbres. La journée est plus calme et je peux faire la sieste sur mon brancard. Au soir, nous remarquons que les bois qui couronnaient les hauteurs à l’est ont été rasés par l’artillerie, découvrant un château d’eau que nous ne soupçonnions pas. Au matin suivant, le château d’eau a aussi disparu."

- 22 MAI -

 

"6 h 20, préparation d’artillerie, 6 h 30, départ de l’attaque, vers 6 h 45, je suis blessé à la tête par un éclat d’obus, soigné par adjudant Lebrun, évacuation sur P.C. bataillon, side-car, route bombardée, Poste Sanitaire du 67ème, Poste Sanitaire du 42ème ; voiture sanitaire ; passage à Brieulles-sur-Bar, quelques instants après le bombardement. J’y ai vu le chef comptable. Piqûre au G.S.D., nombreux blessés. Évacuation sur centre de triage : Sainte-Menehould, puis dirigé sur l’hôpital complémentaire Saint-Nicolas, Verdun. Rencontre de renfort sur la route : éléments mécaniques."

- 23 MAI -

 

"Dès 4 heures du matin, la canonnade commence. Toute la journée, le 1er bataillon et la 10 compagnie doivent faire front aux attaques répétées. Sur l’aile gauche, la résistance fléchit. Du côté de Stonne, le 67e RI a aussi de graves difficultés et doit céder du terrain. Au cours de cette journée, la situation devient critique car nous sommes presque encerclés.
Durant quelques heures, la 3e DIM n’avait disposé que d’un couloir de 500 mètres de large pour ses communications avec l’arrière. Une contre-attaque est prévue pour le lendemain matin mais dans la nuit l’ordre parvient de décrocher au petit jour et de se replier vers Noirval.
Les compagnies en ligne sont aussitôt alertées et les préparatifs sont hâtivement menés. Les moyens de transport sont fortement endommagés et nous ne pouvons envisager de récupérer tout notre matériel. Rassemblant l’essentiel pour le charger dans les véhicules disponibles, nous sommes obligés de détruire tout ce qu’il faut abandonner."

- 24 MAI -

 

"Avant la fin de la nuit, le 1er bataillon qui est à notre gauche commence le départ en se dirigeant vers le château du Mont-Dieu. La colonne s’étire dans un silence relatif en observant les distances de sécurité. Avant le début du jour, les premiers éléments du 3e bataillon partent à leur tour. Quitter une zone aussi menacée et après deux semaines d’angoisse et de souffrance n’est pour déplaire à personne. Cependant tous les visages restent graves. La marche est accélérée malgré la fatigue : aucune pause n’est réclamée car chacun prévoit que l’arrivée du jour sera inévitablement le signal d’un nouveau bombardement. Et puis, et puis… il y a les camarades qu’on laisse là, couchés définitivement sous la terre du Mont-Dieu."

- 25 MAI -

 

"0h30. Un ordre m’arrive. Nous évacuons le bois. La section décrochera une heure plus tard après le reste de la compagnie. Faire du bruit pour laisser croire que le Bois est encore tenu. Emporter tout l’armement et les munitions, détruire le reste. Point de rassemblement du bataillon : Châtillon sur Bar. Itinéraire : Maison Forestière, Château du Mont-Dieu, Côte 182, Sy. […]
Pour comble de malheur, le brouillard est intense mais je pense que cela pourra aussi être un atout pour nous. Le jour pointe. Le Bois est vide, nous le savons. Nous sommes seuls. A droite, à gauche, les camarades sont partis. L’ennemi n’a rien vu sans doute, aucune réaction, pas un obus. Encore une demi-heure et enfin, Maine, l’agent de transmission, porte mon ordre. On va décrocher groupe après groupe comme prévu, le sergent-chef avec le premier et moi avec le dernier.
Mais que se passe-t-il ? A peine nos premiers hommes sont-ils sortis de leur trou que de l’ennemi partent rafales et minen. Nous sommes repérés. Notre mouvement s’exécute quand même mais l’artillerie se met de la partie : « ils » veulent nous barrer la route. Mais il est trop tard pour « eux », sans perdre de temps nous traversons le barrage et disparaissons dans le Bois dont tous les arbres nous sont familiers. Nous avançons le plus vite possible mais avec difficultés tant nous sommes encombrés. Nous respirons, l’alerte a été chaude. […]
Des balles sifflent à nos oreilles mais ce sont les lignes françaises qui tirent sur nous. Par signaux, nous nous faisons reconnaître des Coloniaux qui nous avaient pris pour des Boches. Et nous atteignons Sy."

- 26 MAI -


"Le lendemain matin, c’est le dimanche le 26 mai, nous quittons ce coin de verdure et, traversant le village de Noirval, nous nous dirigeons sur la route de Quatre-Champs. Les obus sont tombés drus dans cette région et nous constatons l’efficacité de ce tir aux nombreux camions calcinés, renversés sur le bord de la route. Sans trop de peine, nous atteingnons en fin de matinée le bois de Vandy. Le PC du régiment est fixé dans un pavillon de chasse nommé « le gai verrat ». Le IIIe bataillon s’installe à la lisière ouest, en bordure de la route qui va vers Vandy et vers Vouziers. Cette fois, nous trouvons le calme et le repos. Les villages voisins évacués sont tout de même habités par quelques lapins de clapiers qui n’ont pu suivre leurs maîtres et jouissent d’une liberté complète. Ils fournissent l’occasion de plats appréciés non sans nous avoir contraints, au préalable, à des chasses à courre de grande allure."

- 27 MAI -

 

"Nous dormons bien la nuit mais on est fréquemment réveillé par le tir de nos pièces lourdes dont certaines batteries sont toutes proches. Elles se mettent en action surtout le soir et pendant la nuit. L’aumônier dit la messe en se servant de l’arrière d’un camion comme autel. La pluie tombe.
Dans la matinée, réunion des officiers au P.C. pour la présentation au nouveau colonel commandant l’I.D. en remplacement du général Buisson. C’est le colonel Lespinasse-Fonsegrive.
Je conserve une Sanitaire du G.S.D. pour les évacuations qui se font régulièrement chaque soir sur Olizy.
A midi, repas avec le personnel, au soir dîner dans les mêmes conditions mais sous la pluie. A ce moment, on vient m’inviter à dîner à la popote du colonel. Il m’est difficile d’y aller seul et de laisser les camarades. Aussi je ne bouge pas. Au bout d’un moment, Mortureux vient me relancer et dissiper le malentendu. Nous y allons tous, cette fois, pour le café seulement."

- 28 MAI -

 

"Réunion des officiers au PC RI (Maison Forestière du Gai Verrat). Le colonel Jacques nous présente le nouveau colonel commandant de l’I.D. en remplacement du colonel Buisson promu général et qui a pris le commandement de la 3e DCR depuis le 16 ou 17 mai. Nous nous présentons aussi au commandant de Boutray, nouveau chef d’Etat-Major du RI."

- 29 MAI -

 

"Chaque nuit le coin de bois où nous couchons est curieusement illuminé par des débris de branchages et de racines phosphorescentes. Nous en rencontrons dans tous les bois de cette région. [...]
Vers l’après-midi , nous recevons l’ordre de départ pour le lendemain matin. Le régiment doit aller à La-Croix-au-Bois et dans la région alentour pour préparer, paraît-il, une position de repli. Après reconnaissance préalable, nous partirons très tôt le lendemain et nous étudierons notre installation à ce moment là."

- 30 MAI -

 

"Le jeudi 30 mai, nous abandonnons le bois de Vandy pour établir une position à quelques kilomètres de là, dans le bois de Quatre-Champs. Les compagnies occupent la lisière nord et leur emplacements d’armes sont activement creusés. La C.R.M.E. et la C.A.B. 3 dressent des barricades sur la route, dans le village de Quatre-Champs et installent à proximité les canons anti-char de 25. […]
Le P.C. du régiment a été reporté dans le village de Boult-aux-Bois sur la route de Stenay à Vouziers où séjourne également le Ier bataillon – le IIe bataillon est installé à la partie est du bois de Quatre-Champs."

- 31 MAI -

 

"Organisation de la position défensive. Les hommes creusent rapidement aussitôt que le plan de feux est prêt. Les abris pour armes automatiques sont vite terminés et fortifiés. Nous avons reçu du fil barbelé et nombre de piquets sont déjà enfoncés. C’est à ce moment qu’arrivent les renforts : des hommes de 35 à 40 ans (plusieurs proviennent du 213ème) ; ils ont un très mauvais moral et obéissent difficilement."

- 1er JUIN -

 

"Organisation de la position à Quatre-Champs : nous établissons une bretelle : la 9ème compagnie est en liaison à gauche avec la 10ème compagnie, à droite avec le II/91 (5ème compagnie), la limite droite du sous-quartier étant, à la lisière nord des bois de Quatre-Champs, le point où la route Quatre-Champs, Belleville pénètre dans le bois."

- 2 JUIN -

 

"Au matin se présente le conducteur Miellet, un Boulonnais venant du 291e RI, désigné pour remplacé Mouchin pour la conduite de la 201. La messe est dite par l’aumônier sous les arbres au poste de secours. Le colonel vient y assister. Il m’invite à déjeuner à sa popote avec l’abbé Vignaud. Nous y apprenons que Legrand est remplacé par le lieutenant Ollivier comme officier de renseignements.
Dans l’après-midi, je me fais couper les cheveux par un homme du génie. Ensuite, promenade dans le bois au cours de laquelle nous remarquons un camion américain touché par le régiment. Nous avons la visite d’officiers d’artillerie lourde appartenant à un échelon installé récemment à côté de nous. Après le dîner, nous allons prendre le café avec le capitaine Dujon dont la popote est installée à l’autre bout du village."

- 3 JUIN -


"Alerté le 2 juin dans l’après-midi, le R.I. part à la tombée de la nuit et se porte dans les bois de La Besogne où il arrive, éléments auto vers 6h00, éléments à pieds de 9h00 à midi. Les 3 bataillons et les Unités Régimentaires sont dispersés dans le bois. Le P.C.R.I. est à Chevières. Après étude de la défense de l’Aire de Termes à Saint-Juvin, le III/Bon organise défensivement le village de Termes, le I/91 celui de Grandham."

- 4 JUIN -

 

"Le mouvement vers Chevières commence dans la nuit du 3 juin. Dans la journée, des troupeaux de gros bétail récupéré dans les villages évacués ont défilé sans arrêt sur la route et, inévitablement, on laissé sur la route des souvenirs de toute dimensions dans lesquels pataugent copieusement les premiers détachements des troupes à pied. Si cela doit porter bonheur, les favorisés du sort seront nombreux !
La route est longue et les préparatifs du départ avaient fatigués tout le monde de sorte que les ombres du sud de Chevières enveloppent dès les premières heures de la matinée une foule de dormeurs épuisés. Le temps est magnifique et, sans arrêt, les bombardiers passent très haut au-dessus de nos têtes vers d’autres objectifs."

- 5 JUIN -

 

Unité au repos, nous sommes recomplétés par des éléments disparates, rescapés des unités chargées de la garde des positions de la Meuse qui ont été mises en déroute les 13 et 14 mai. Le moral de ces éléments est très douteux."

- 6 JUIN -

 

"Au matin, l’aumônier dit sa messe pour le brancardier tué. Peu après, nous avons la visite du médecin-colonel Xambieu, qui me demande si nous sommes prêts maintenant, au point de vue du matériel, à rentrer dans la bagarre dans les 48 heures. En fin de matinée, je vais prendre un bain dans l’étang du château accompagné de Chaix, Créac’h et Beauchard. Après le déjeuner, visite à Chaux et au 2e bataillon, installés dans un bois voisin. Je retourne prendre un bain avec Creac’h. Il fait un temps superbe : des avions passent et vers le soir nous apercevons une saucisse à l’horizon."

- 7 JUIN -


"A 19 heures, je pars dans la 201 accompagné de Beauchard dans le but de reconnaître notre nouvel emplacement. Nous passons par Chevières, Senuc, Montcheutin, Séchault ; à ce moment-là un combat aérien se déroule au-dessus de nous qui se termine par la chute d’un ou deux avions incendiés. Nous avons cependant continué notre chemin sans insister. Presque tous les villages traversés sont barricadés contre les chars.
Malgré ces préparatifs de combat, nous revoyons pour la première fois depuis le 13 mai quelques civils et même des femmes.
Arrivés à Ardeuil-Montfauxelles, nous prenons la direction d’Aure et enfin, à droite vers la ferme Vaudu. Nous y retrouvons le comandant de Boutrey et Sabatier : il serait question d’une attaque allemande vers l’ouest, sur l’Aisne. Nous nous choisissons un emplacement dans un bosquet à côté de la ferme. Nous regagnons enfin notre P.C. aux environs de Chevières aux environ de 23h00. Denise a déjà tout fait replier et nous couchons sur l’herbe de la prairie."

- 8 JUIN -

 

"Le samedi 8, nouveau mouvement. C’est le début d’une activité qui ne cessera plus qu’avec les hostilités. Le régiment va s’installer à une quinzaine de kilomètres au Sud de Vouziers entre Monthois et Sommepy. Le P.C. du colonel est fixé à Liry : on y travaille fiévreusement à la préparation de plusieurs contre-attaques hypothétiques alors qu’en direction de Vouziers, des bombardements nourris allument de vastes incendies. Notre séjour ici est de courte durée."

- 9 JUIN - 

 

"P.C., le 9 juin 1940 - Ordre d’opération n°3
______________________________
Contre-attaque sur Rethel

I. Situation et mission
Voir directives du général commandant la 3e D.I.M
II. Moyens supplémentaires à la disposition des bataillons
Ier Btn : 1 section de la C.D.A.C à 2 canons de 25
IIIe Btn : 1 section de la C.D.A.C à 3 canons de 25 et 1 section de la C.R.M.E à 2 canons de 25
IIe Btn : 1 section de la CDAC à 1 canon de 25
Restent à la disposition du colonel (aux ordres du capitaine Dujon)
- 1 section de la C.R.M.E à 2 canons de 25
- 1 section de mitrailleuses de 20
- 1 section de mitrailleuse de 8 sur chenillettes
- 1 section de mortiers sur chenillettes
III. Dispositif à réaliser à chaque bond :
a) Jusqu’à l’objectif T.2
Le régiment marche dans le dispositif suivant : 1er Btn à droite, 3e Btn à gauche, 2e Btn derrière le premier, groupement Dujon sur l’axe du Régiment avec le colonel"

- 10 JUIN -

 

"Départ pour exécuter la contre-attaque en direction de neufchâtel. Le 51ème R.I. à droite, le 67ème R.I. en réserve ; Le P.C.R.I. se porte vers Orfeuil, carrefour est ; ultérieurement la côte 167. Le I/91 par Orfeuil gagne la route Machault-St Etienne à Arnes et la tient en liaison avec le 51ème à Machault et le III/91 à St Etienne. Le III/91 par les lisières du bois s’est porté sur St Etienne qu’il tient face à l’ouest et au sud. Le II/91 est en réserve au centre du dispositif vers la côte 167. La nuit tombée, le R.I. reçoit l’ordre de fait face au nord et à l’ouest : III/91 St Etienne à Arnes ; I/91 : route de St Etienne à Machault ; II/91 Semides et les carrefours de la R.N. à l’ouest ; P.C.R.I. : Ferme de Scay"

- 11 JUIN -

 

"A 11h45, le III/91 est soumis à une attaque de chars sur la route de Machault. Les canons de 25 du bataillon et une pièce du GRD/6 mettent 5 chars hors de combat. L’ennemi n’insiste pas et se borne à harceler de bataillon par tirs d’artillerie et d’avions. A 13h30, le II/67 signale l’approche d’une colonne motorisée par la route de Mazagran : elle est à plusieurs reprises prise à partie par les 2 groupes d’artillerie de façon efficace et n’insiste pas. A 15h des éléments à pieds tentent de déboucher des bois N.O. de Semide. Les tirs d’artillerie arrêtent ce mouvement qui, après quelques tentatives infructueuses ne sera pas repris."

- 12 JUIN -


"En fait, le 1er bataillon du 91ème RI, prêté à un Corps d’Armée voisin fut oublié au cours de la nuit ! C’est par hasard que le commandant [du 1er bataillon] apprend le 12 juin vers 4 heures que l’ordre de repli en direction de Suippes a été donné, début du mouvement : 2 heures.
Il réussira à gagner Jonchery, où, attaqué de flanc par des blindés allemands ayant repris leur mouvement au jour, il devra passer sur la rive est de la Suippe et sous cette protection, gagner Suippes. La 1ère compagnie du 91ème ne fut pas touchée de l’ordre de repli : sans ordre de la 14e DI, l’agent de transmission [du bataillon] porteur de l’ordre ayant été intercepté par les Allemands. Cette unité eut une tenue parfaite pendant toute la journée : attaquée à plusieurs reprises, elle utilisa toutes les munitions causant sur un terrain très favorable de grosses pertes à l’assaillant. Le lieutenant Genest commandant la compagnie déclara à son entourage au plus fort du combat « un Saint-Cyrien ne se rend pas ».
Effectivement, il fut abattu d’un coup de pistolet à la nuque alors que, simple servant, il continuait d’actionner une mitrailleuse."

 

(note : sa citation signale qu’il tirait au revolver lorsqu’il fut tué )

- 13 JUIN -

 

"Vers 2h une pause est faite dans le village d’Auve et, bien qu’on le leur défende, les hommes sont entrés dans les habitations, aussi nous perdons beaucoup de monde : endormis, oubliés ou qui ne peuvent plus suivre. A 3h le capitaine Tourenne décide d’aller lui-même trouver le commandant Hanus ou le colonel afin d’essayer d’avoir des voitures pour transporter les hommes. Nous ne le reverrons plus et nous n’avons plus qu’un side-car comme moyen de liaison. La route est dure.
Vers 5h30, les hommes n’en peuvent plus, le capitaine Perrat donne l’ordre de s’arrêter dans un village. Presque aussitpot le lieutenant Ollivier et le sous-lieutenant Baudet arrivent avec 4 ou 5 camions et camionnettes, chargent le plus de monde possible et s’en vont en nous recommandant de nous presser sur l’itinéraire fixé et en nous promettant de venir chercher le reste du bataillon : à peine 80 hommes et 5 officiers."

- 14 JUIN -

 

"Départ vers Ligny-en-Barrois. Notre détachement se compose d’une centaine d’hommes, de 7 voiturettes et d’une chenillete. Le lieutenant Sechiari commandant la CAB2 du 51e RI prend le commandement de l’ensemble. La route de Bar à Ligny est encombrée par les colonnes militaires et les colonnes de réfugiés. Nous nous arrêtons à l’entrée de Ligny. Pendant cet arrêt, le lieutenant Thuilier essaie d’avoir des renseignements : toujours rien. Un side du 51ème nous rejoint. Le Lieutenant Sechiari décide d’aller à neufchâteau chercher des ordres. Il revient peu de temps après : il a vu le colonel Bousquet, nous devons rejoindre Neufchâteau pour nous mettre sous ses ordres."

- 15 JUIN -

 

"Finalement, après avoir échappé de justesse à une colonne blindée, après avoir momentanément protégé la retraite à une position d’artillerie dans les bois de Combes, à l’ouest de Bar-le-Duc, il nous fut impossible de bouger. Partout les Allemands ramassaient des prisonniers « à la pelle ». Nous étions dans le layon, assez réduits en nombre d’ailleurs. Il était alors envisagé que chaque chef de section emmène avec lui sa section pour essayer de la ramener dans les lignes. Personnellement, je ne tenais pas à être fait prisonnier mais les hommes, complètement éreintés par les marches subintrantes et les guérillas n’avaient plus beaucoup de ressort. On perdit ainsi du temps de sorte que brusquement les Allemands ont surgi. […] Je me précipitai alors dans les bois et je me cachait derrière un arbre. Craignant d’être poursuivi, je m’enfonçai dans les bois espérant que d’autres viendraient m’y rejoindre. J’errai ainsi jusqu’au soir. Finalement le miracle s’est produit : je vis arriver une patrouille : c’était le sous-lieutenant Villain du 67e RI, conduisant 8 hommes qui avaient fait comme moi et tentaient de rejoindre les lignes françaises."

- 16 JUIN -

 

"A 7h, tout le monde est sur ses positions. Le Lt Gufflet prend le Point d’Appui de la route de Chaumont avec une section de FM et un Groupe de Mitrailleuses ; je prends le PA de la route de Langres. Les hommes inemployés restent à Febrecourt sous les ordres d’un adjudant de la 51ème. Le colonel Bousquet nous parle d’une relève, aussi le lieutenant Sechiari décide d’envoyer les hommes en surnombre et sans armes vers Besançon. Le Lt Jacquart et ses hommes mécaniciens ne perdent pas leur temps et en vue d’un prochain départ récupèrent dans Neufchâteau les voitures qu’ils peuvent trouver en panne ou abîmées par les bombardements. Un autocar est remis en état."

- 17 JUIN -

 

"Le colonel paraît avoir une avance sensible sur la DI, poursuit son mouvement et tâche d’atteindre Sombernon avant le lever du jour. Il en est empêché par l’encombrement des routes et n’arrivera au carrefour de Sombernon au nord (4 km environ) que vers 5h. Des isolés, des colonnes qui refluent, semblent indiquer semblent indiquer que ce point est tenu. Un motocycliste envoyé dans le village y voit deux sentinelles ennemies en conversation avec des habitants ; deux camions déchargent des hommes en feldgrau. Il en est rendu compte à la DI et le colonel cherche de même façon le passage à Pont de Passy. Mêmes constatations à Malhain qu’à Sombernon. Le colonel établit alors un bouchon au village de Charmoy puis replie ce qui lui reste à Bordes-Bricart qu’il organise en PA antichars. Vers midi, la Division tente avec le GRDI et un char B un coup de force sur Sombernon pour s’ouvrir le passage . Le 91ème suit le mouvement derrière le QG DI. La tentative échoue."

- 18 JUIN -

 

"En raison de l’épuisement profond des officiers et des hommes qui n’ont pas vu les cuisines roulantes depuis le 13 juin à Humbeauville et qui n’ont ni mangé ni dormi suffisamment depuis cette date, le colonel est obligé de réveiller lui-même les officiers et les hommes qui dorment profondément à 7h du matin. Tout le monde est en place lorsque vers 9h paraît sur la route de Sombrenon une voiture allemande dans laquelle a pris place le capitaine Hennebert de l’EM DI. Celui-ci annonce au colonel que la DI dépose les armes et le prie de laisser le passage aux officiers allemands. Il invite le colonel à se rendre au PC de la DI où ces renseignements lui sont confirmés.
Dans la matinée, après la reddition, l’ennemi refusa de désarmer le colonel, lequel eut une dernière preuve de fidélité et d’affection de ses hommes. En effet, ceux-ci, bien qu’épuisés, dans un dernier sursaut d’énergie et de fierté défilèrent en armes en présence de n’ennemi et rendirent les honneurs à leur chef. Nous étions sales, nous étions hirsutes, mais il ne manquait pas un fusil. "

- 19 JUIN -

 

"A 3h, nous partons. Je fais connaissance avec mon nouveau chef de bataillon, le capitaine Arragon. A 10h, nous sommes arrivés : Gironcourt près de Châtenois. Sur la route, un Lieutenant-Colonel d’Etat-Major m’interpelle, me demande ce que je faisais ici. « Votre division doit être dans les environs car le 3e RIC doit être en liaison avec elle sur la droite. » Forcément, je n’ai rien trouvé.
Nous prenons position avec mission de résister sur place mais dès que la cannonade se fait trop proche, nous embarquons vers 16h. Arrêt à Ambacourt où nous passons la nuit."

- 20 JUIN -

 

"A 5h, le capitaine Arragon reçoit un ordre de mouvement que nous exécutons tout de suite. Le 3ème RIC va prendre position entre Bouzzanville et Boulaincourt. Le 2ème bataillon défend Boulaincourt, le 3ème Bouzzanville et mon bataillon s’installe entre les 2 villages. Aucun couvert, pas d’armes antichars, nous nous plaçons comme nous pouvons. Peu de réfugiés circulent dans notre coin. Nous apprenons que l’ennemi n’est pas loin.
Le soir, le 2ème bataillon se rend : quelques Allemands sont venus dans le village et ont répété les paroles du Maréchal Pétain. Aussitôt, les hommes ont fait un tas de leurs armes sur la place et ont suivi les Allemands. Seuls les officiers ont refusé et ont Rejoint le PC RI. La nuit des fusées ennemies se voient autour de nous. Nous faisons face à Boulaincourt en resserrant le dispositif."

- 21 JUIN -

 

"Journée fiévreuse. Attente de l’Allemand. Le matin nous envoyons une reconnaissance à Boulaincourt : pas un Allemand, les armes sont encore sur la place du village. Nous ramassons toutes les vivres que nous pouvons emporter. On aimerait des ordres mais rien : le colonel ne sait rien , pas plus que la DI, pas plus que l’Etat-Major du Corps d’Armée Colonial installé sur la Butte de Sion.
Vers midi, le village est encadré par quelques obus : un officier et quelques soldats sont blessés. La population qui nous voyait déjà d’un mauvais œil nous demande de ne pas opposer de résistance, le Maréchal Pétain a parlé.
Vers 16h, un officier Allemand et deux soldats allemands font leur apparition dans Bouzzanville et demande à voir le colonel. Mêmes discours que la veille mais le colonel Chauvin refuse de se rendre. Les Allemands s’en vont ; une demi-heure après, le village est cerné par les panzers, nous sommes obligés de déposer les armes. Pendant cette demi-heure de liberté, le colonel et quelques officiers s’étaient sauvés vers la Butte de Sion."

- 22  JUIN -

 

"Après avoir échappé à l’encerclement le 16 juin avec deux autres sous-officiers et quelques hommes du régiment, nous nous sommes soustraits aux regards de l’ennemi. Restait à mettre en œuvre les projets qui s’imposaient au sujet de notre emblème. Le groupe se dirigea vers Tonnerre d’où, par camion, nous pûmes rejoindre Avallon. De là un véhicule de la division les transporta à Saulieu puis une voiture du régiment les amena à Château-Chinon. Là, le capitaine Runner de l’Etat-Major de la Division prit le commandement des éléments jusqu’à Saramon, dans le Gers où étaient rassemblés les quelques 700 camarades de la division. C’était le 22 juin, le Drapeau était sauvé ! Il fut le seul à être présenté aux éléments regroupés de la division, à Saramon, au cours d’une émouvante prise d’armes, quelques jours avant la démobilisation des appelés, cérémonie au cours de laquelle le chef de bataillon May du 67e RI prononça une allocution."